Les tapis de Kochkor

Comment se fabrique un tapis de feutre décoré de symboles kirghizes

La coopérative « Altyn Kol» a été fondée à Kochkor, au Kirghizistan en 1996, sous l’impulsion d’Helvetas Switzerland. À ses débuts elle comptait deux cent femmes de tous les villages alentours, aujourd’hui elle réunit une quarantaine de femmes, parmi elles quelques jeunes femmes âgées de 20 ans et plus. Il existe une deuxième coopérative dans le même village.

Vidéo sur la fabrication de tapis en feutre au Kirghizistan

De géométrie souvent symétrique, les motifs symboliques de ces tapis représentent des cornes de bouquetin, des ailes, une tête d’aigle ou des ondulations de montagnes qui font le tour du tapis. Jadis de couleurs plutôt mattes, les tapis ont aujourd’hui viré vers des couleurs plus vives… pour correspondre aux goûts des acheteurs potentiels que sont les touristes. On utilise de la laine brute de mouton, de coloris brun ou blanc, que l’on teinte avec des colorants chimiques. La laine brute est disponible sur place puisque la plupart des familles paysannes kirghizes possèdent leurs propres moutons. Elle est patiemment débarrassée des brins d’herbe et autres saletés emmêlées à ses filaments, puis découpée en touffes et en brins d’une dizaine de centimètres de long. Ses brins sont cassés à l’aide de barres métalliques, brossés dans des peignes aux dents d’acier, jusqu’à ce que la laine obtienne la fine structure désirée. Chaque feutre est constitué de deux couches superposées, les brins raccourcis à quelques cinq centimètres étant orientés perpendiculairement d’une couche à l’autre. À l’aide de laines teintées, on dessine les motifs du tapis sur une cloison de roseaux déposée au sol. Puis les interstices sont complétés de laine brune ou blanche, jusqu’à obtenir la forme et la taille du tapis désirées.
Tout en humidifiant la laine en abondance à l’aide d’eau bouillante, la cloison de roseaux et le feutre sont alors soigneusement enroulés en un cylindre régulier, fermé par une longue lanière. Le cylindre est à nouveau arrosé d’eau bouillante. Survient la partie gymnique de la fabrication, qui consiste à fortement piétiner le cylindre pour tasser la laine et la solidifier, pendant que le cylindre est roulé au sol, sous les pas. C’est l’acte de fabrication du feutre proprement dit, qui dure plus de 30 minutes. Il se déroule dans la bonne humeur, accompagné de chansons ou de rengaines rythmiques. Le cylindre peut ensuite être détaché et déroulé au sol, dévoilant le tapis de feutre presque achevé. Une finition attentive est encore effectuée par pression des coudes et des avant-bras, pour obtenir une épaisseur uniforme, une structure plus souple et un dessin correspondant aux attentes. Le tapis, désormais souple et pliable sans que le feutre ne se défasse, doit ensuite être lavé à plusieurs reprises, séché durant 24 heures puis une nouvelle fois détrempé d’eau bouillante, compressé et lavé. Ainsi naissent des chefs d’œuvres d’artisanat, qui doivent régulièrement être dépoussiérés à la main, les filaments de feutre détestant l’aspirateur, sous risque d’être progressivement arrachés au tapis

Boutique de tapis de feutre de la coopértive Altyn Kol, à Kochkor

Les tapis aux motifs découpés et cousus

D’autres tapis sont assemblés à l’aide de feutres confectionnés par des machines. Les motifs sont rigoureusement symétriques, dessinés à la craie sur le feutre. On superpose deux couleurs de feutre différentes, dont les motifs sont soigneusement découpés aux ciseaux, puis emboîtés l’un dans l’autre en alternant les couleurs. Chaque motif est détouré à l’aide de deux ficelles de couleur, constituées de trois brins filés en torons de sens inverse; les morceaux de feutre et les ficelles les détourant sont assemblés au fil et à l’aiguille, à la manière d’un puzzle. Parfois les motifs sont encore renforcés d’une frise de couleur. Le puzzle ainsi assemblé est ensuite cousu sur une double couche de feutre brun, sur lequel le tapis reposera au sol.

Tapis aux motifs de feutre découpés et cousus

Un commentaire

  1. Perraudin Kalbermatter

    Trop bien ce reportage et magnifiques ces femmes et leurs créations! Merci!

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